Vendredi soir, dans la salle Moisant de Neuvy-le-Roi, une cinquantaine de personnes était présente à l’invitation des « Amis de la chapelle saint André » pour découvrir l’extraordinaire odyssée d’Élie Picard, un Lochois d’origine modeste, né le 8 juin 1 779, sachant lire et écrire, qui passa 15 années de sa vie dans la Grande Armée. Marc Houtard, vice-président de l'association dévoila le programme de la soirée et, pour présenter le personnage, sujet de la conférence, ce sont deux conférenciers qui se relayèrent durant les 2 heures passionnantes retraçant le parcours de ce grognard.
Marc Houtard présente le déroulement de la soirée
Les conférenciers, deux Lochois bien connus
Patrick Binet, éditeur, passionné d’histoire, est déjà venu à Neuvy-le-Roi pour une conférence sur la généalogie, domaine qu’il affectionne également.
Pascal Dubrisay, homme de culture, responsable de l’office du tourisme de Loches, maire adjoint pendant 19 ans en charge du patrimoine et de la culture, à l’origine du livre « Élie Picard (1779-1859) Mémorial d’un grognard ».
Les conférenciers, Pascal Dubrisay et Patrick Binet
Pourquoi l’édition d’un livre ?
En 1982, Pascal Dubrisay et son épouse, achètent une maison à Loches, l’hôtel de la Rabière. Au cours de leur installation, ils font un peu de nettoyage et lorsqu’ils arrivent au grenier, ils y découvrent des cartons remplis de papiers et, entre les solives et les tuiles, ils dénichent des cahiers d’écoliers datant du début du XIXe siècle,
écrits d'une belle écriture soignée sur un papier jauni. La curiosité de Pascal pour l'Histoire a immédiatement été mise en éveil. Il venait de découvrir les mémoires de guerre d'un grognard qui avait traversé la Révolution et l'Empire sous les drapeaux ! Les trouvant très intéressants, il les classa comme faisant partie du patrimoine de cette maison.
Quelques dizaines d'années plus tard, fort de son expérience et de sa connaissance de l'histoire et du patrimoi-ne de la ville, il s'est mis à écrire sur Loches et a trouvé en Patrick Binet, son ami, un éditeur passionné par les mêmes sujets, également soucieux de leur mise en valeur.
Après le décès d’André Montoux, un écrivain spécialiste des vieux logis de Touraine, en septembre 2 013, sa fille trouva un dossier intitulé « Hôtel de la Rabière ». Elle en fit don à Pascal Dubrisay qui s’empressa d’en lire le contenu : des cahiers d’un ancien instituteur, Élie Picard, qui relataient ses souvenirs de grognard. Il les classa avec les premiers cahiers trouvés dans le grenier.
En 2015, à la foire aux livres de Chanceaux, les deux amis rencontrèrent Jean Tulard. Ils lui présentèrent l’histoire des cahiers. Pascal témoigna : « Il fut très intéressé par cette histoire et nous encouragea à écrire un livre avec ces documents inédits en insistant sur le fait qu’il n’existe que très peu d’écrits venant des gens de la base. On lui parla de l’histoire de Cabrera et là, il nous dit : Il faut absolument écrire votre livre. Je veux bien faire votre préface ! »
C’est ainsi que commença ce travail « à quatre mains » comme aiment le dire les deux auteurs.
L’histoire d’Élie Picard
Né à Loches sous le règne de Louis XVI, il mena sans doute la vie d'un enfant ordinaire, loin d'imaginer que les événements de la Révolution et de l'Empire le porteraient à se surpasser et à nous offrir bien des années plus tard le témoignage hors pair d'un grognard qui vécut parfois le meilleur mais souvent le pire.
Pendant 15 ans, il va sillonner une grande partie de l’Europe (Autriche, Prusse, Pologne, Espagne…), participer aux grandes batailles, en prenant soin de rédiger sur de simples feuillets, les moments marquants où, dans l’ombre de l’Empereur, il participera à sa gloire et à celle de la France. C’est dans le 7e corps d’armée qu’il s’illustrera en tant que brigadier. Très débrouillard, il permettra à ses hommes d’échapper plusieurs fois à la mort. Après la bataille d’Eylau, le 8 juillet 1807, Napoléon lui promit de lui remettre la Croix de la Légion d’Honneur.
Envoyé en Espagne, il sera fait prisonnier comme beaucoup des soldats de la Grande Armée. Peu d’entre eux survivront.
Pour avoir été détenu par les Espagnols sur les pontons de Cadix, de Portchester et, pire encore, dans l’île de Cabrera, où il passera 5 ans, considérée comme le premier camp de concentration de l’Histoire, il n’existe pas de meilleur témoin de toutes ces souffrances endurées au nom de la guerre.
Il sera libéré et rentrera à Loches en 1814. Ses parents sont morts, il se demande que faire. Un an après son retour, il se marie et décide d’ouvrir un institut et crée une pension pour accueillir les enfants de la bonne société. Au moment des Cent jours, on revient le chercher, mais il refuse de repartir. Dans son école, il n’oublie pas de mettre un cachot pour y enfermer les enfants récalcitrants. La porte de la prison est toujours visible dans l’hôtel de la Rabière. Il enseignera jusqu’en 1 847.
C’est le 6 février 1851, que Louis Napoléon Bonaparte, lui remettra enfin la Croix de la Légion d’Honneur promise par Napoléon. Il décédera le 3 mai 1859 et repose dans le cimetière de Loches. Sur sa tombe, on peut lire : « Ici repose un homme de bien ! »
Madeleine fargues remercie les conférenciers
Après cette conférence à deux voix, Madeleine Fargues, présidente de l’association, remercia les conférenciers, puis, un échange intéressant se déroula entre conférenciers et public et une séance de dédicaces regroupa les protagonistes avant le partage du verre de l’amitié, offert par « Les Amis de la chapelle saint André ».
Une affluence au moment des dédicaces
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